185 milliards de fcfa. c'est le montant que le conseil du café- cacao a perdu lors de la campagne 2016-2017 de la filière cacao.
Cette information émane du rapport du cabinet international d'expertise‐ comptable, d'audit et de conseil, Kpmg, commis par les autorités ivoiriennes pour un audit et dont Jeune afrique s'est procuré le rapport. cette crise qui avait secoué ce secteur, avait occasionné des mécontentements chez les producteurs, des pertes aussi bien chez eux que chez l'etat ivoirien (on parle de 400 à 500 milliards fcfa). il est ressorti de cet audit que la surproduction a engendré un soutien de l'etat estimé à 86 milliards fcfa quand la revente de contrats en défaut a entraîné un coût de 68 milliards. et l'utilisation des volumes de la récolte intermédiaire pour honorer des contrats de la récolte principale a conduit à un soutien de 32 milliards fcfa.
Selon l'audit de Kpmg, le gouvernement a utilisé le fonds de stabilisation logé dans les banques commerciales et financé depuis la campagne 2012- 2013, pour compenser ces pertes. 197 milliards de fcfa y ont été pré- levés. le fonds de réserve est lui, selon le rapport de Kmpg, crédité de 170 milliards de fcfa. Dans ce rapport, le conseil café-cacao est fortement épinglé. en effet, cet organe qui a mis en œuvre la réforme de 2012, articulée autour d'un système de ventes anticipées de la récolte et qui devait garantir une certaine stabilité du revenu au producteur, en dépit des fluctuations des cours mondiaux, n'a pu jouer son rôle. il est reproché au régulateur d'avoir distribué des autorisations d'exportation à des entreprises qui n'avaient pas la surface financière ni les compétences requises pour vendre à l'international.
Le cabinet Kpmg révèle que 32 de ces compagnies, dont les deux tiers sont ivoiriennes, n'ont pas pu honorer leurs contrats lorsque les cours mondiaux ont plongé. les contrats en défaut accordés par le ccc à des exportateurs incapables de les vendre sont particulièrement pointés du doigt. il est vrai qu'une bonne partie avait déjà été annulée par le ccc, mais l'audit de Kpmg en a identifié de nouveaux. ainsi, sur la campagne 2016-2017, ils représentent un volume de 220 303 tonnes de fèves pour un montant de 399 milliards de fcfa. ces contrats représentent 20 % des ventes anticipées, c'est-à-dire faites par le conseil café-cacao avant le début de la campagne. une fois annulés, ils ont été revendus à d'autres acheteurs mais à des prix bien moins importants, d'où la perte des 68 milliards fcfa. Le cas des exportateurs 32 exportateurs sont concernés.
68 % d'entre eux sont membres du groupement d'intérêt économique PMieX-coopex (Petites et moyennes industries et des coopé- ratives exportatrices de café- cacao), dont les conditions d'accès au marché ont été allégées afin d'ouvrir l'exportation de cacao aux ivoiriens. le classement des exportateurs ivoiriens de cacao sur les trois dernières campagnes, 2014-2015, 2015-2016 et 2016- 2017 (voir tableau), en termes de part de déblocages et d'exportations de tous les 54 exportateurs ivoiriens, a même été publié dans le rapport d'audit de Kpmg. les cinq premières sociétés détenant la plus grande part de contrats de déblocages et exportations sont Saf cacao avec 16,66%, S3c avec 10,86% et africa Sourcing avec 8.3%.
Suivent Nocoacy, en quatrième position avec 7,75% et coex ci qui ferme la marche des cinq premiers avec 6,09%. il faut ajouter que ce rapport révèle que les sociétés S3c, africa Sourcing, et coex ci entre autres, n'ont fait à ce jour aucun défaut. Pour Kpmg, les difficultés rencontrées pour estimer la production annuelle de cacao ont eu également des conséquences néfastes. lors de la campagne 2016-2017, la côte d'ivoire a produit 250 000 tonnes de plus, soit un surplus de 16 %. cette surproduction a entraîné un désé- quilibre entre l'offre et la demande.
Pour compenser la baisse des prix qui en a résulté et maintenir le prix bord champs destiné aux producteurs, le gouvernement a dû mettre la main à la poche. l'audit révèle également qu'en fixant le prix de référence (destiné aux exportateurs) en fonction de la moyenne de la production des trois dernières campagnes, sans tenir compte de la hausse de la production, le ccc n'a pas anticipé les conséquences de la baisse des prix. Pour Kpmg, la crise de la filière cacao s'explique notamment par des «dysfonctionnements dans l'application des règles de gestion des opérations commerciales et des règles de détermination de la production».
Dans le cas des contrats en défaut, le cabinet international cible deux causes : la spéculation de certains opérateurs et la mauvaise gestion du ccc. l'audit déplore «l'absence, au niveau du conseil, d'un suivi rigoureux des procédures d'agrément des exportateurs et d'une procédure de vérification de leur capacité à honorer leurs engagements». le rapport d'audit estime que le conseil café-cacao a réagi trop tardivement pour tenter de juguler la crise.
Pour les auditeurs, la réaction tardive du conseil lors de la crise a «crispé les opérateurs, semé le doute et finalement accentué la crise de commercialisation du cacao en côte d'ivoire». Toute chose qui explique la campagne 2016-2017 désastreuse au niveau de la filière cacao.