Wall Street : le Dow Jones perd 4,6 % à l’issue d’une séance chaotique
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La Matinale du 05/02/2018
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Wall Street : le Dow Jones perd 4,6 % à l’issue d’une séance chaotique

La hausse des salaires aux Etats-Unis a suscité un retour des craintes inflationnistes. Mais il n’est pas encore question de krach boursier.

Le Monde | • Mis à jour le | Par

Un trader après la clôture de la bourse de New York et la chute de l’indice Dow Jones, le 5 février.

Sévère correction à Wall Street : l’indice Dow Jones a perdu, lundi 5 février, 1 175 points à 24 345 points, soit un recul de 4,6 % tandis que le Nasdaq, l’indice riche en technologies, perdait 3,8 %. Cette séance, la pire depuis août 2011, fait suite à celle de vendredi où l’indice américain avait déjà perdu 2,54 %.

Ces événements ne font pas l’affaire de Donald Trump, qui n’a eu cesse de citer la Bourse comme juge de paix de son action. Dans un discours dans le MidWest, le président n’a pas évoqué la chute de Wall Street. Mais Sarah Sanders, porte-parole de la Maison Blanche a réagi: « Le président se concentre sur nos fondamentaux économiques à long terme qui restent exceptionnellement forts, avec le renforcement de la croissance économique, un taux de chômage historiquement bas et des salaires en hausse pour les travailleurs américains ».

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Le déclencheur de ce mouvement de vente a été la publication vendredi matin par le département du travail américain de chiffres exceptionnellement bons pour l’emploi : non seulement l’économie américaine a créé 200 000 emplois en janvier, soit plus qu’attendu, mais surtout, les salaires ont progressé au rythme annuel de 2,9 %, contre 2,5 %. Du jamais vu depuis la fin de la récession en juin 2009. Cette tension sur les salaires était attendue en vain depuis des années, ceux-ci ne progressant pas aux Etats-Unis en dépit d’un taux chômage au plus bas depuis le début du siècle (4,1 %).

En attente de la nouvelle politique de la Fed

Ce retour à la normale a immédiatement suscité un retour des craintes inflationnistes du côté des opérateurs financiers. Si les actions sont élevées, c’est en raison des taux d’intérêts bas. Il est trop tôt pour parler de krach. Si la Bourse a effacé ses gains depuis le début de l’année et perdu 9 % depuis le plus haut historique atteint le 26 janvier, sa progression sur un an reste de 21,5 % et sur trois ans de 64 %. Visiblement, la baisse a été accélérée par les ventes automatiques.

Hasard du calendrier, ce lundi était le jour où Jerome Powell prêtait serment pour devenir président de la Réserve fédérale. Le successeur de Janet Yellen, dans une allocution podcastée, a assuré qu’« aujourd’hui, le chômage est bas, l’économie est en croissance, et l’inflation est basse. Par nos décisions de politique monétaire, nous soutiendrons une croissance économique continue, un marché du travail sain et la stabilité des prix », a déclaré M. Powell.

Le retour de la hausse des prix pourrait inciter la Réserve Fédérale Américaine à augmenter plus rapidement ses taux que prévu. En décembre, en augmentant ses taux directeurs d’un quart de points (compris entre 1,25 et 1,5 %), elle a laissé entendre qu’elle pourrait procéder à trois resserrements supplémentaires du crédit.

Ce rythme pourrait s’accélérer en période de surchauffe économique, d’autant que les colombes se font rares à la Fed avec le départ de Janet Yellen et de son adjoint Stanley Fischer. Toutefois, il n’y a pas eu de panique sur le marché obligataire. Les taux d’intérêt à dix ans sont retombés lundi à 2,794 % après avoir touché un plus haut de 2,852 vendredi soir. Ce mouvement s’explique parce que des vendeurs d’actions ont réinvesti sur les bons du trésor américain pour limiter leurs risques.

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Une hausse du dollar

Dans ce contexte, la crise boursière américaine, qui a fait chuter les autres bourses mondiales (Tokyo a reculé lundi de 2,5 % et reculait mardi de 5,3% tandis quele Stoxx Europe 600 perdait lundi 1,6 %), a conduit à une hausse paradoxale du dollar. En cas de crise, les opérateurs choisissent la devise américaine, qui a gagné 0,2 % vis-à-vis des monnaies extérieures et 0,3 % par rapport à l’euro. Ce phénomène a été amplifié par le discours de Mario Draghi, le président de la banque centrale européenne mettant en garde contre une hausse de l’euro, dans des propos tenus devant le Parlement européen. « La récente volatilité du taux de change a suscité de nouveaux vents contraires et ses implications pour les perspectives de stabilité des prix à moyen terme sont à surveiller de près », a déclaré M. Draghi.

La surchauffe américaine peut s’expliquer par un triple phénomène : la politique monétaire très accommodante depuis des années, mais aussi la réforme fiscale : celle-ci a conduit les entreprises qui regorgeaient de liquidités à les rapatrier aux Etats-Unis et va accentuer le déficit budgétaire des Etats-Unis, qui était encore supérieur à 3 % en 2017. Depuis le début des débats, la plupart des économistes estiment ce stimulus budgétaire inutile, voire dangereux.

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Toutefois, sur le fond, la hausse des salaires aux Etats-Unis, si elle était confirmée, est une des meilleures nouvelles économiques engrangée depuis longtemps. Leur stagnation, conjuguée à une hausse des inégalités qu’incarne l’envolée de Wall Street, a conduit à une grave dégradation de la cohésion sociale aux Etats-Unis. Logiquement, ce retour à la normale marquerait la fin de l’argent gratuit et donc une valorisation plus faible des actifs, même si les profits des entreprises restent, pour 80 % des entreprises, supérieurs aux prévisions.