Taux d’intérêt : une douloureuse cure de désintox en vue pour les marchés
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Économie
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Taux d’intérêt : une douloureuse cure de désintox en vue pour les marchés

En 2018, les banques centrales vont accélérer la normalisation de leur politique. Un virage que la planète finance, accro aux liquidités monétaires, attend avec nervosité.

Le Monde | | Par

Des traders suivent l’annonce de la remontée des taux de la Réserve fédérale américaine, le 14 juin 2017 à la Bourse de New York.

Chronique. Alcool, cigarette, héroïne : quelle que soit la substance, mettre un terme à dix ans d’addiction est aussi difficile que douloureux. Il en va de même dans le monde financier. Après une décennie de taux bas et de soutiens monétaires exceptionnels, les grandes banques centrales vont, en 2018, tourner la page. Doucement, bien sûr. La Réserve fédérale américaine (Fed) va poursuivre le relèvement de ses taux. Et la Banque centrale européenne (BCE) devrait, en toute fin d’année, interrompre ses rachats de dettes publiques et privées (le quantitative easing en anglais, ou QE), en prélude à une hausse de ses taux, courant 2019.

Cela veut dire que les taux auxquels les Etats s’endettent vont remonter des deux côtés de l’Atlantique. Cela signifie aussi que l’épargne des ménages rapportera plus. Dans tous les cas, cette hausse est inévitable, et même souhaitable, puisqu’elle est synonyme d’une économie mondiale en meilleure santé : croissance plus solide, rentrées fiscales regonflées, salaires en augmentation, moindre chômage… Alors, où est le problème ?

La tension monte

Le sevrage, justement. Sur la planète finance, il se déroule rarement sereinement. Tels des patients entrant en cure de désintoxication, les marchés, accros aux liquidités des instituts monétaires, conscients qu’il faudra tôt au tard réduire la dose, sont nerveux. Voire un peu paranos. Ils surinterprètent des paroles anodines, qu’ils comprennent parfois de travers – en particulier celles des banquiers centraux. Voilà pourquoi la mission de ces derniers est si difficile.

Ces derniers jours, la tension est montée d’un cran lorsque Bill Gross, l’un des grands gourous de la finance, aujourd’hui chez Janus Capital, a déclaré sur Twitter que « la tendance observée depuis vingt-cinq ans sur les taux américains à 5 et 10 ans est rompue ». C’est-à-dire qu’ils allaient remonter. De fait, les taux à 10 ans sont repassés au-dessus de la barre des 2,5 %.

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