Contre les mauvaises odeurs corporelles, des anticorps en plastique
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Contre les mauvaises odeurs corporelles, des anticorps en plastique

Ces polymères de synthèse pourraient fournir la base de déodorants non toxiques. Ils servent déjà pour la détection de contaminants présents dans les eaux.

Le Monde | | Par

Modélisation d’un polymère (bleu turquoise) et de sa molécule cible (gris). Karsten Haupt, UTC-CNRS

Ce sont des matériaux bio-inspirés aux vertus prometteuses. Leurs applications potentielles ? La cosmétique : ils pourraient donner naissance à une nouvelle génération de déodorants corporels, plus respectueux de l’écosystème de notre peau. Mais aussi l’imagerie biomédicale, le traitement des cancers… Certains sont déjà commercialisés pour la détection de contaminants (mycotoxines, antibiotiques, pesticides et herbicides, hormones, perturbateurs endocriniens…), dans les eaux ou les denrées alimentaires.

Ces matériaux sont des anticorps artificiels, nommés « polymères à empreintes moléculaires » ou MIP (acronyme anglais). En clair, ce sont des réseaux 3D de polymères de synthèse. Ils sont dotés de cavités sur-mesure, abritant des « récepteurs chimiques », choisis pour reconnaître des molécules-cibles (un contaminant, par exemple). Comment fabrique-t-on ces pseudo-anticorps ? L’astuce consiste à ajouter la molécule-cible dans le milieu réactionnel, à base de monomères dotés de ces récepteurs: ces monomères s’organisent en se moulant autour de la molécule-cible. On laisse la réaction de polymérisation se produire, puis on ôte la molécule-cible. Résultat : le polymère apparaît creusé de cavités « complémentaires en forme, en taille et en groupes chimiques fonctionnels » de la molécule cible, explique Jeanne Tse Sum Bui, qui vient de recevoir la médaille de cristal 2017 du CNRS pour ses travaux dans ce domaine, à l’Université de technologie de Compiègne (UTC) en France.

Ces fac-similés reconnaissent leur cible avec une affinité et une spécificité comparables à celle des anticorps naturels. Leur point fort ? « A température ambiante, ils sont bien plus stables que les anticorps naturels : pas besoin de les conserver à 4°C. Autre atout : leur production est rapide, simple et peu coûteuse. Et elle ne nécessite pas le sacrifice de vies animales », relève Jeanne Tse Sum Bui.

A vrai dire, le concept n’est pas neuf : il a été forgé...