
Il ne faut pas se tromper sur la nature de l’accord scellé, vendredi 12 janvier à Berlin, entre les conservateurs (CDU-CSU) et les sociaux-démocrates (SPD). S’il constitue l’ébauche d’un programme de gouvernement pour les quatre ans à venir, il s’agit avant tout d’un compromis de circonstance qui vise à éviter ce que les dirigeants des trois partis, à l’instar d’une majorité d’Allemands, redoutent au plus haut point : la tenue de nouvelles élections, quelques mois seulement après celles du 24 septembre 2017, qui ont vu l’extrême droite entrer au Bundestag pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale.
Pour rendre possible un tel compromis, chacun des deux camps a dû reculer sur certains points, tout en veillant à imposer sa propre marque ici et là. Le document de vingt-huit pages publié vendredi matin en témoigne. Le fait – assez surprenant pour un tel texte – que le premier chapitre soit consacré à la politique européenne (« Un nouvel élan pour l’Europe ») est ainsi une claire concession faite à Martin Schulz, le président du SPD. « Schulz devait justifier d’avoir accepté de discuter avec les conservateurs après avoir juré, le soir des élections, qu’il n’était plus question de gouverner avec eux. En faisant en sorte que l’Europe soit mise en tête des priorités de la future “grande coalition”, il a obtenu une victoire personnelle, lui dont l’ADN politique est lié à son passé d’ex-président du Parlement européen », analyse un proche.
A l’inverse, les conservateurs ont imposé l’essentiel de leurs vues en matière de politique migratoire. Une limite, comprise entre 180 000 et 200 000, sera ainsi fixée au nombre de demandeurs d’asile susceptibles d’être accueillis chaque année en Allemagne. De même, le regroupement familial pour les réfugiés bénéficiant d’une « protection subsidiaire » (ceux qui ont obtenu un titre de séjour d’un an renouvelable) sera strictement encadré. Actuellement suspendu, il va certes pouvoir reprendre, comme...