
Maurice Béjart (1927-2007) rayonne toujours. Populaire ? Celui qui réalisa son rêve d’une danse grand public rassemblant les foules dans des palais des sports a réussi son affaire. Il est devenu le porte-étendard d’une certaine idée du spectacle de danse métissé avant l’heure, théâtral et philosophique, ouvert sur les cultures et les musiques du monde. Dans la biographie intitulée Béjart. Le démiurge, Ariane Dollfus trace, avec une foule de détails glanés auprès de dizaines de danseurs et collaborateurs, les grandes étapes et motifs esthétiques de la carrière du chorégraphe dont la vie et l’œuvre se sont entremêlées.
Celui qui fila un sérieux coup de pied dans les codes classiques, en mettant les hommes en jean et en imposant des femmes athlétiques, est né en 1927, à Marseille. Du sang noir coule dans ses veines : celui de son arrière-grand-mère paternelle, Fatou Diagne, sénégalaise. Son père est le philosophe Gaston Berger, ce qui explique sans doute l’esprit d’ouverture et de curiosité de Béjart qui, tout jeune, lit Shakespeare, mais aussi les pièces de Sacha Guitry. Dès l’âge de 8 ans, celui qui allait convertir, quelques années plus tard, des textes signés Nietzsche ou Faust à la cause de la danse met en scène de petits spectacles de marionnettes avant de faire répéter sa première troupe, composée de sa sœur et de deux cousins.
Phénomène mondialSes débuts d’interprète ont lieu en 1945 dans le ballet de l’Opéra de Marseille, avant qu’il poursuive ses apprentissages à Paris. Béjart n’a pas le physique de l’emploi, mais il saute bien et bosse beaucoup. Il s’essaie vite à la chorégraphie et explose en 1955 avec Symphonie pour un homme seul, qu’il considère comme une « naissance chorégraphique », sur la musique de Pierre Henry et Pierre Schaeffer. La suite file. A Bruxelles, à partir de 1959, Béjart fait grimper la danse en haut de l’affiche avec sa version, qui fit scandale à l’époque, du Sacre du printemps,...