
Un gouvernement qui convoque un éditeur avant la publication d’un livre : la démarche est assez rare pour indiquer que l’affaire est grave. Le 19 décembre 2017, Frédéric Potier, à la tête de la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah, placée sous l’autorité du premier ministre), recevait Antoine Gallimard, PDG de la société du même nom, accompagné par l’écrivain Pierre Assouline.
Il a été question de la réédition des pamphlets hystériquement antisémites et pronazis publiés par Louis-Ferdinand Céline (1894-1961) avant et pendant la seconde guerre mondiale, que la maison d’Antoine Gallimard est en train de préparer et dont Pierre Assouline sera le préfacier. Une date a circulé dans la presse : mai 2018, qui n’est plus d’actualité. Le volume, dit-on chez Gallimard, paraîtra quand il sera prêt, sans autre précision.
Frédéric Potier souhaitait, selon les termes de la lettre qu’il avait envoyée le 12 décembre à Antoine Gallimard pour l’inviter à cette rencontre, et dont L’Express a publié des extraits, s’assurer « que cette édition offrira[it] toutes les garanties nécessaires », c’est-à-dire qu’elle serait accompagnée d’un appareil critique capable d’« éclairer le contexte idéologique de [la] production » des pamphlets.
En un temps de montée de l’antisémitismeSelon nos informations, il a précisé ce qu’il entendait par là lors du rendez-vous du 19 décembre, indiquant qu’il lui semblait plus prudent, en un temps de montée de l’antisémitisme, de confier le soin d’éditer ces textes à un collectif interdisciplinaire qui inclurait des historiens. Il s’est vu opposer une fin de non-recevoir de la part des futurs éditeur et préfacier du volume : ces textes étant d’abord, à leurs yeux, des textes littéraires, l’éclairage d’un spécialiste de l’œuvre de Céline serait suffisant.
En l’occurrence, celui de Régis Tettamanzi, professeur de...