
Pourquoi l’Europe peut-elle redevenir intéressante ?
La question est surprenante, car aujourd’hui l’hypothèse d’une dislocation ou d’une évaporation progressive du projet européen n’est pas à exclure. Qu’il s’agisse du retrait de la Grande-Bretagne, de l’impuissance de l’Union européenne devant le tournant autoritaire et antidémocratique d’Etats comme la Hongrie ou la Pologne (lesquels s’affranchissent allégrement des principes qui figurent au sein même des traités européens), de notre incapacité à apporter non pas une réponse généreuse ou utopique mais simplement conforme aux principes de la convention de Genève aux demandeurs d’asile, rien n’incite à l’optimisme. Tous ces éléments pourraient conduire à porter un regard très désabusé sur l’aventure européenne.
« Il existe en France des clivages forts entre différentes conceptions de la vie en société sans que personne puisse être soupçonné d’être “pour” ou “contre” la France.»Néanmoins, je discerne quelques éléments d’espoir quand j’entends des voix s’élever pour inviter à une plus grande politisation du projet européen, comme celle, par exemple, de mon collègue universitaire, l’homme politique belge Paul Magnette [ministre-président de la Wallonie, il a retardé en 2016 la signature de l’Accord économique et commercial global (CETA) entre l’Union européenne et le Canada]. Nous nous sommes enfermés trop longtemps dans une opposition stérile entre les pro-européens et les anti-européens. Trop longtemps, nous avons considéré que, si l’on est pro-européen, on est obligé d’accepter l’idée qu’il n’y ait qu’une seule politique économique possible, celle empruntée depuis 1986, depuis l’Acte unique et le lancement du marché intérieur. Il est temps de situer les débats sur la forme concrète que doit prendre le projet européen au sein de l’Union européenne elle-même. Exactement comme on le fait à l’échelon national : il existe en France des clivages forts entre différentes...