
Livre. Passons sur le mépris quelque peu obsidional affiché par l’auteur à l’égard du « parti des médias », cette « caste » à ses yeux égocentrique, superficielle et incompétente dont on l’imaginait pourtant membre éminent, en tant que producteur-chroniqueur à France Culture depuis des lustres.
Passons également sur l’admiration envahissante dont il témoigne à l’égard de ce président philosophe, doté d’une « colonne vertébrale théorique impressionnante » qui siège à l’Elysée depuis sept mois. C’est tout juste s’il doute, en conclusion, que son « activisme enthousiaste » suffise à renverser le sombre pessimisme des Français, à réconcilier une société anxieuse et à remettre en mouvement une Europe encalminée.
Ces deux agacements surmontés, le livre que Brice Couturier consacre à Emmanuel Macron est utile et éclairant. Utile, parce qu’il fait l’exégèse des mille et un discours, textes ou entretiens qui ont permis au candidat Macron de préciser sa conception de la politique et sa vision de la France et du monde. Et parce que, en même temps, il décortique savamment – le plus souvent pour les récuser – les critiques qui lui ont été opposées ; notamment celle qui consiste à mettre la démarche philosophique du chef de l’Etat sur le compte d’une « simple stratégie de communication, destinée à gommer la réalité technocratique du personnage », alors que celui-ci est, au contraire, « un authentique intellectuel ».
Décodage minutieuxCe postulat posé, l’analyse fournit un décodage minutieux du logiciel intellectuel du chef de l’Etat. Au-delà de l’apprentissage à la lecture d’Hegel, bientôt corrigé par le compagnonnage avec Paul Ricœur, maintes fois évoqué par Macron lui-même, Brice Couturier explore bien d’autres sources auxquelles s’est nourri le futur président : en particulier le « libertarisme égalitariste » de John Rawls, la théorie des « capabilités »...