
New Mosaics of Ravenna, d’Invader, Control P, 134 p., 28 €.
Récemment, la silhouette de l’écrivain américain William Burroughs (1914-1997) est réapparue, sous la forme d’une haute mosaïque, à l’entrée de la rue Gît-le-Cœur, à Paris. Représenté de dos, avec son imper et son chapeau, l’auteur marche vers le petit hôtel où il était descendu, dans les années 1950, avec Jack Kerouac et Allen Ginsberg, ses compagnons de la Beat generation. Invader, artiste bien connu pour ses figurines collées dans les rues de Paris, Tokyo ou New York, cite d’emblée cette nouvelle œuvre quand on l’interroge sur son rapport aux livres et à la littérature : « Burroughs a beaucoup compté pour moi, comme toutes les figures de la contre-culture, et je ne peux pas séparer cet écrivain d’un groupe de rock comme le Velvet Underground ou d’un artiste comme Warhol. A mes yeux, la littérature, c’était une façon de me faire ma propre éducation, d’accéder à un univers qu’on n’étudiait pas à l’école, bref de me marginaliser », confie celui qui a grandi en écoutant de la musique punk, dans un milieu où on lisait peu de livres, et qui s’est familiarisé avec la théorie esthétique en arrivant aux Beaux-Arts de Rouen, à commencer par les écrits de Walter Benjamin.
Mosaïques explicitement inspirées du patrimoine littéraireA travers Benjamin, penseur de la flânerie libertaire et des passages parisiens, on touche un aspect plus profond de la relation qu’entretient Invader avec la chose écrite. Par-delà les mosaïques explicitement inspirées du patrimoine littéraire, et notamment des contes enfantins (La Petite Sirène, Alice au pays des merveilles…), il y a sa pratique singulière, qui relève de la course effrénée mais aussi du discours éperdu. Car cet artiste obstinément anonyme s’est fait scripteur un brin mégalo, conjuguant inscription urbaine et écriture ineffaçable, invasion graphique et dissémination autobiographique....