Les questions qui se posent après la collision entre un car scolaire et un TER à Millas
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Économie

Les questions qui se posent après la collision entre un car scolaire et un TER à Millas

SNCF Réseau, qui gère l’infrastructure ferroviaire, a engagé un plan pour la sécurisation des passages à niveau, d’un coût d’environ 40 millions d’euros par an.

Le Monde | • Mis à jour le

A Millas (Pyrénées-Orientales), au lendemain de la collision entre un car et un TER, vendredi 15 décembre.

Cinq adolescents ont été tués et six autres se trouvent dans un état grave après la collision de leur car scolaire avec un train, jeudi 14 décembre à Millas (Pyrénées-Orientales), selon un bilan précisé en fin de matinée vendredi par la préfecture des Pyrénées-Orientales.

Vingt-quatre personnes ont été impliquées dans l’accident, dont dix-neuf enfants âgés de 11 à 17 ans, scolarisés au collège Christian-Bourquin, à Millas. Au lendemain de la collision, plusieurs questions se posent.

  • Comment la SNCF gère-t-elle ses passages à niveau ?

Les passages à niveau sont-ils suffisamment sécurisés ? Ce n’est pas la première fois qu’ils sont critiqués. Ils font une trentaine de morts en moyenne chaque année en France, et le bilan pour 2017 sera particulièrement sombre (déjà un peu plus de trente morts depuis le 1er janvier, jusqu’à la catastrophe de Millas).

SNCF Réseau, la branche du groupe public qui gère l’infrastructure ferroviaire, a engagé un plan pour la sécurisation des passages à niveau, d’un coût d’environ 40 millions d’euros par an. La SNCF n’en supprime que cinq à sept chaque année, ceux jugés les plus accidentogènes. Un rythme qui lui permettra d’en venir à bout dans plus de… deux mille ans.

Lire toute l’analyse:   Une trentaine de morts chaque année aux passages à niveau en France

L’entreprise ferroviaire a néanmoins précisé que le passage à niveau en question n’était pas concerné par le plan de sécurisation actuellement mis en place. « Il était muni de demi-barrières et d’une signalisation lumineuse automatique, selon les normes de sécurité en vigueur. »

Le plan de sécurisation de la SNCF consiste également à mettre en place des techniques expérimentales d’évitement des accidents aux passages à niveau. Des détecteurs d’obstacle ont été testés en sept endroits en 2017.

Par ailleurs, quarante-deux radars ont été installés sur la route à l’approche de la voie ferrée, ainsi que quatre-vingts radars antifranchissement destinés à verbaliser les contrevenants qui forcent le passage en zigzaguant entre les barrières.

Reste aussi le travail préventif, auquel la SNCF consacre 2 millions d’euros par an. Le 2 juin, à l’occasion d’une journée de mobilisation sur les dangers des passages à niveau, une vaste campagne d’information insistant sur les messages au jeune public a été lancée.

  • Défaillance technique ou erreur humaine ?

Les barrières du passage à niveau étaient-elles ouvertes, laissant la conductrice du car s’engouffrer sur la voie, ou fermées ? S’agit-il d’une défaillance technique ou d’une erreur humaine ? Il est trop tôt pour répondre à ces questions, auxquelles les enquêtes juridiques et administratives qui commencent devront apporter des réponses.

Mais le procureur de la République de Marseille, qui s’est saisi de l’enquête, a apporté les premiers éléments vendredi soir. Selon Xavier Tarabeux, les quatorze témoignages d’ores et déjà recueillis par les enquêteurs font état, dans leur majorité, de « barrières fermées » au passage à niveau.

Selon un porte-parole de l’entreprise d’autocars Faure, la conductrice, qui a été blessée lors de l’accident et n’a pas été entendue par les enquêteurs, a affirmé que « les barrières du passage à niveau étaient levées et que le feu était éteint » quand elle s’est engagée. La SNCF qui, elle, a affirmé dès jeudi que le « passage à niveau a[vait] fonctionné normalement », s’est dite « choquée par les accusations » de la compagnie de car.

Il s’agit d’un passage à niveau « classique » doté d’une signalisation automatique et de deux barrières, qui « n’était pas considéré comme particulièrement dangereux », selon la SNCF.

« Il y avait une bonne visibilité », a confirmé Carole Delga, la présidente socialiste de la région Occitanie. « Ce passage à niveau-là n’était pas vraiment dangereux (…) et il n’y avait pas eu d’alerte technique », a-t-elle dit sur Europe 1. La ministre des transports, Elisabeth Borne, a pour sa part appelé à la « prudence » s’agissant des circonstances du drame, notamment sur la fermeture ou non des barrières du passage à niveau.

Trois enquêtes ont été ouvertes parallèlement : une « enquête de flagrance pour les infractions d’homicide et de blessures involontaires », confiée au groupement de la gendarmerie des Pyrénées-Orientales, une autre du Bureau d’enquête sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT), qui a pour mission de mener, en toute indépendance, des enquêtes techniques sur les accidents ou incidents graves de transport terrestre. La SNCF a ouvert, elle, une enquête interne.

  • Que sont les plans blanc et rouge qui ont été déclenchés ?

Le plan blanc, déclenché jeudi soir, concerne l’hôpital et la clinique Saint-Pierre de Perpignan. Il s’agit d’un dispositif prévu par les autorités de santé pour faire face à ces situations exceptionnelles. Il comporte de nombreux acteurs, des services d’urgence aux autorités de santé, qui doivent répartir au mieux les patients dans les lits disponibles, transports, ambulanciers, hôpitaux.

Le plan rouge, également appelé plan NOVI (pour « nombreuses victimes »), est déclenché pour organiser l’intervention des premiers secours. Il est activé lorsque les moyens habituels de secours ne suffisent plus et qu’il est nécessaire de coordonner l’action de différents services de l’Etat. Durant toute la durée du plan, les opérations de secours, dans leur ensemble, sont placées sous l’autorité du préfet.

  • Y a-t-il des précédents ?

La collision survenue à Millas est l’un des accidents les plus graves pour des véhicules transportant des enfants depuis le drame de Beaune, en 1982. Il existe toutefois des précédents.

11 février 2016 : le montant de la remorque d’un camion éventre sur toute sa longueur un autocar scolaire croisé dans une rue de Rochefort (Charente-Maritime). Six adolescents sont tués et deux sont blessés.

10 février 2016 : un autocar scolaire circulant sur la neige avec trente-deux personnes à bord quitte la route près de Montbenoît (Doubs) et se couche sur le flanc. Deux adolescents, de 12 et 15 ans, sont tués et sept personnes sont blessées.

22 juillet 2014 : six personnes, dont cinq enfants âgés d’une dizaine d’années, sont tuées dans la collision d’un minibus et d’un poids lourd à Courteranges, près de Troyes.

2 juin 2008 : sept enfants sont tués à Allinges (Haute-Savoie) dans la collision d’un TER et d’un car scolaire à un passage à niveau au lieu-dit Mésinges.

18 décembre 2000 : quatre personnes, dont trois collégiens, sont tuées dans une collision entre un poids lourd et un minibus de ramassage scolaire sur la route nationale 60 entre Orléans et Montargis (Loiret).

8 avril 1993 : quatre personnes, dont trois enfants, sont tuées dans la collision entre un train et leur minibus scolaire à un passage à niveau près d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).

15 janvier 1990 : dans l’Aube, trois adolescents sont tués dans l’accident du car scolaire qui les emmenait au lycée, sur la nationale 77 entre Troyes et Arcis-sur-Aube (Aube).

31 juillet 1982 : vers 2 heures du matin, cinquante-trois personnes, dont quarante-quatre enfants, périssent dans l’incendie du car qui les conduisait en colonie de vacances, à la suite d’une collision avec plusieurs véhicules sur l’autoroute 6, près de Beaune (Côte-d’Or).